La tragédie du court terme

On connaissait la tragédie des communs. Selon le biologiste Garett Hardin (Sciences, 1968) l’usage commun des ressources naturelles conduit à sa surexploitation et la privatisation est la solution. Selon d’autres courants de pensée, la privatisation conduit aussi à la surexploitation, de manière différente, et la solution est la gestion commune, collective.

Il y maintenant selon des économistes la tragédie du court et du long terme ( Nicolas Hulot, Le Monde, 2 juillet 2019). Deux tragédies que dessinent notre avenir dans l’espace et dans le temps. Le long terme c’est notre temps commun à tous, et encore plus à nos enfants. Le court terme c’est celui de chacun, et de la génération des adultes d’aujourd’hui, des entreprises, des consommateurs compulsifs.

Communs et court/long terme ont donc beaucoup à voir. Les productions à long terme comme les forêts sont en partie gérées comme des communs – même si la gestion à long terme laisse la place à une gestion court terme en France par l’ONF). Les tourbières sont des espaces communs le plus souvent. En revanche les cultures annuelles sont généralement privées, comme les cultures de céréales ou de légumes mais avec des pratiques qui, de façon encore majoritaire, épuisent le sol.

Les rivières sont des biens communs dans lesquels des utilisateurs privés puisent parfois au delà du possible, mettant en péril ce bien commun.

La tragédie est là. Au théâtre on parle d’unité de lieu et de temps, et des acteurs jouent sur la scène. Sur la scène de la Planète, nous vivons une unité de lieu et de temps, et nous sommes tous les acteurs.

Temps, espace et démocratie écologique

Il y a une contradiction entre le temps court de la démocratie et le temps long des enjeux écologiques, mais ce n’est pas en bricolant les instances démocratiques dans le cadre territorial actuel que l’on pourra dépasser cette contradiction. Il faut repenser le cadre territorial dans la perspective de la conversion écologique et démocratique. Le cadre des grands États n’est compatible ni avec les enjeux écologiques, ni avec un réel processus démocratique (le processus formel est respecté mais en mode très dégradé).

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Philippe Bihouix, L’âge des low tech

Voici un livre drôle, engagé, instructif, qui donne envie d’agir. Pas si courant. Un livre parfois vite écrit, approximatif, mais ça fait partie du jeu. C’est une symphonie inachevée.

Le titre est accrocheur, mais le livre ne traite pas que de technologies, il aborde aussi les questions de l’épuisement des ressources, de la baisse nécessaire de la consommation, des politiques monétaires… Nous rendons compte ici essentiellement de l’aspect relatif aux technologies et à la consommation, le reste étant développé dans de nombreuses autres Lire la suite « Philippe Bihouix, L’âge des low tech »

Paroles de Francis Hallé

J’ai vu le film de Francis Hallé, Il était une forêt. Prenant. je retiens en particulier deux de ses réflexions, à partager.

Nous souffrons de notre puissance.

Les arbres sont nos racines : l’animal règne sur l’espace, l’arbre règne sur le temps.

A rapprocher du constat que les arbres ont un génome beaucoup plus complexe que celui des animaux, car ils doivent s’adapter sans bouger sur une longue période (dans son ouvrage L’arbre).

Mais… un ami m’a transmis une appréciation critique de ces formules, que je reprends donc ici.

Les arbres ne sont pas à l’origine des animaux, les deux règnes provenant d’un ancêtre commun. Ils ne sont donc pas les racines de notre existence, même si nous en dépendons, comme des espèces animales, pour notre vie.

Le génome de l’arbre n’est pas plus complexe, il peut être plus important que celui des animaux car certains végétaux sont polyploides et accumulent des gènes provenant d’espèces proches. Ce n’est pas plus complexe mais redondant.

Enfin l’adaptation des arbres est une adaptation des individus à leur environnement, pas une évolution, les deux notions doivent être distinguées.

La distinction espace temps entre les règnes animal et végétal doit être précisée. Les animaux sont plus mobiles sur l’espace, tandis que les végétaux couvrent, d’un point de vue statique, la plus grande part de l’espace terrestre émergé. Et des végétaux ont une durée de vie très longue (« ils règnent sur le temps »), bien que l’on trouve des animaux marins comme les colonies de coraux qui ont également une durée de vie très longue.

Il n’empêche ! Pour moi le monde végétal est, globalement, signe de durée, et les animaux de mobilité.