L’éthique du champion, une éthique dangereuse

L’éthique du champion est une idée force de notre Président de la République. Un migrant sauve un enfant, c’est un champion, il est décoré. Des entreprises  remportent des succès à l’exportation, ce sont des championnes. Le champion est celui qui réussit, on ne discute pas le contenu du résultat, s’il réussit, c’est Bien. Champion de course de voiture, de saut en hauteur, de jeu vidéo, de vente de n’importe quoi, seul le résultat compte. Le résultat, pas le sens.

Nous nous inspirons ici librement de Jacques Ellul (Le vouloir et le faire, un critique théologique de la morale, Labor et Fides, 2013). Pour Ellul, la morale contemporaine est une morale technicienne fondée sur le comportement, pas sur les valeurs. Il faut correspondre aux exigences de fonctionnement de la société, dominée par la technique. Si je me conforme, je réussi, la réussite c’est le Bien. C’est donc un processus inverse des morales précédentes où les valeurs définies par la société définissaient le comportement attendu. Fidélité, famille, solidarité… maintenant c’est le comportement imposé par la technique qui induit le comportement des hommes, donc la morale. Il faut être adapté. Le normal a remplacé le moral.

Cette éthique du champion n’est pas innocente, elle est même dangereuse. Elle impose l’efficacité comme mesure de la morale. Alors que c’est le sens qui importe. Il en est de même dans l’évaluation des politiques publiques, on mesure l’atteinte des résultats, le débat sur le pourquoi étant censé avoir eu lieu avant. Pour éviter la normalisation et revenir à la moralisation, il faut donc lutter contre l’instrument de la normalisation, contre la technique.

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