Le projet de référendum sur Notre Dame des Landes pose une vraie question démocratique. Cette question de la démocratie représentative est aussi ancienne que la démocratie elle-même, mais se pose de façon renouvelée. Il ne s’agit plus de l’avenir d’une société, mais de l’avenir de l’humanité et de la biosphère, si l’on veut bien considérer que tout « grand projet » met en cause toute notre notion de développement, selon le principe hologrammatique de la complexité (Edgar Morin).
Depuis une dizaine d’années que ce projet est en débat public en Loire-Atlantique, certains, le plus grand nombre sans doute, ne savent pas encore quoi en penser.
Il y a ceux qui ont des convictions idéologiques fortes, pour ou contre, mais ils sont une minorité. Une partie d’entre eux a en plus étudié de près le dossier de l’aéroport et peut argumenter sa position. Mais… Le débat se déplace sur la question de la ZAD, et là souvent l’idéologie l’emporte sur la connaissance, que l’on soit pour ou contre, car il ne s’agit plus d’étudier des dossiers, mais de connaître une réalité, donc d’aller sur place voir, au delà des informations et des rumeurs, entre lesquelles il est difficile de distinguer le vrai et le faux, le partiel, le partial et le global.
Le plus inquiétant c’est que probablement la majorité des citoyens du département se reconnaîtrait dans la position suivante : « je ne connais pas assez le dossier pour décider ». On en rencontre partout, même dans des groupes militants. C’est tout à l’honneur de ceux qui ne veulent pas décider sans connaître, mais c’est aussi un manque d’investissement de leur part, car tous les éléments du dossier sont disponibles, publiés, diffusés (sauf ceux que le gouvernement ne voulait pas diffuser mais qu’il a fini par transmettre).
Peut-on demander à tous les citoyens de lire les rapports d’expertise économique, environnementale, juridique, sur le sujet ? Non. Ceci illustre les réflexions du philosophe Hans Jonas dans Le principe responsabilité : les enjeux dans notre société sont devenus tellement complexes que l’on ne peut plus choisir le « bien » de façon simple, toute décision demande étude et débat (cf. Habermas).
Comment sortir de cette impasse démocratique ? Il y a trois hypothèses:
Confirmer la capacité à décider par une minorité légitime, les élus, ce qui est le principe de la démocratie représentative. Mais, au delà même de la pratique ondoyante de notre président, on en voit bien les limites aujourd’hui. Et les tentatives de panels citoyens, d’enquêtes publiques et débats publics, ne suffisent pas.
Faire en sorte que toute la population soit suffisamment formée et informée pour décider sur les projets importants. La montée du niveau global d’éducation pourrait peut être le permettre, mais la population le souhaite-t-elle, le ferait-elle ?
Diminuer la complexité des projets de telle sorte que la décision soit plus simple à prendre. C’est le choix d’une société plus simple (cf. Christus n° 244), cohérent avec une diminution de la consommation de ressources. La fin de ce que l’on nomme les « grands projets inutiles ».
Le référendum pourrait porter sur cette question, c’est un préalable à la question de l’aéroport.