Earth beyond six of nine planetary boundaries
Sci. Adv., 9 (37), eadh2458. DOI: 10.1126/sciadv.adh2458.
Cette troisième édition des neuf frontières de la planète est structurée autour d’une part de ce que nous de déversons dans le milieu naturel (CO2, nitrates, phosphates, particules fines, produits chimiques), ce qui était le cas dès le début, et, plus nouveau, ce que nous prélevons (production
primaire nette). Ce dernier indicateur sert à caractériser la biodiversité de manière plus significative que l’évaluation des populations. On pourrait ajouter que les nitrates font partie des deux puisqu’ils sont produits à partir de l’azote prélevé dans l’air, et les phosphates à partir des minerais prélevés dans les carrières. Ce double mouvement est très explicite.
L’indicateur eau douce est un peu complexe et demande à consulter la bibliographie pour le comprendre, mais très élaboré et intéressant. Il mesure la part du territoire émergé (hors glaciers et banquises) qui connaît des périodes extrêmes de sécheresse ou d’humidité, définies comme les 5 centiles extrêmes de variation du flux (eau bleue) ou de l’humidité du sol (eau verte) par rapport à une moyenne sur les 200 dernières années pour la période pré industrielle, ou jusqu’en 2005 pour la période industrielle.

Résultat : sur les neuf frontières, six sont dépassées dont trois sont en zone critique (intégrité biologique c’est-à-dire biodiversité, flux de nitrates et phosphates et nouveaux produits chimiques. Trois continuent de se dégrader, climat, usage des sols et eau douce. Une est proche de dépasser la frontière, l’acidification des océans et une seule s’améliore (lentement), l’ozone.
On pourrait bien sûr ajouter des quantités d’autres indicateurs comme les espèces invasives qui sont une des causes majeures de perte de la biodiversité, la part de territoire disponible pour les animaux sauvages (mais la définition varie selon la taille des animaux, un lion a besoin de plus d’espace qu’un hérisson), la part des animaux sauvages dans la biomasse des mammifères (désormais réduite à 10%). Mais les neuf frontières sont déjà très alarmantes.
Cette édition essaie de modéliser les interactions entre les facteurs, essentiellement entre la concentration de CO2 et la part restante de surfaces forestières. Une façon intéressante d’équilibrer l’attention entre les phénomènes climatiques et biologiques. Il faudrait, mais plus tard, intégrer l’épuisement des ressources en eau, sable et autres minéraux et métaux, la troisième dimension de la crise écologique.
Il ne manque que quelques données socio-économiques sur les causes de ces déséquilibres. Le donut était une façon d’y répondre. Nous proposons seulement deux indicateurs[1] :
- Le niveau d’inégalités sachant que les inégalités génèrent des sur consommations des plus riches d’une part, une tension à l’imitation de leur mode de vie d’autre part (effet Velben).
- Inégalités de revenu, coefficient de Gini < 0,2
- Inégalités de patrimoine, coefficient de Gini < 0,4
- La part du capital dans le revenu, sachant que la rémunération du capital est le principal point de blocage pour revenir à un mode de production respectueux de notre milieu naturel. Une valeur de 3 apparaît comme un maximum d’un point de vue social, elle a été même inférieure à 3 entre 1940 et 1970 (niveau mondial). Et cette valeur pourrait dépasser 6 après 2060.
[1] Thomas Piketty, Le capital au XXIème siècle, Seuil, 2013.